Ne pas craindre l'ampleur de la tâche

Je ne voulais pas rester silencieuse ce matin... Même si je suis en train de procéder aux dernières retouches de mon manuscrit et que chaque minute compte, je voulais être près de vous. Tout simplement.
 
J'avais envie de vous partager un texte que j'ai trouvé dans une vieille boîte à chaussures. Au bas de la page, le nom de l'auteur n'y figurait pas. Non pas qu'il avait oublié de signer ses mots, mais probablement que celui qui avait repris le texte avait omis, par oubli, de le noter.
 
Voici...
 
Bonne lecture et bonne semaine tout le monde!
 
Jocelyne
 
 
* * *
Une grande montagne couvre de son ombre un petit village. Privés de soleil, les enfants sont rachitiques. Un beau jour, les habitants voient le plus ancien d’entre eux se diriger vers les abords du village, une cuillère en céramique dans la main.

- Où vas-tu ? lui demandent-ils.

- Je vais à la montagne.

- Pour quoi faire ?

- Pour la déplacer.

- Avec quoi ?

- Avec cette cuillère.

- Tu es fou ! Tu ne pourras jamais !

- Je ne suis pas fou: je sais que je pourrai jamais, mais il faut bien que quelqu'un commence.

* * *

Travailleur autonome mais aussi travailleur de vie…

[Image prise sur le Web]


 
Lancer une entreprise, tout le monde peut le faire. Ça prend une idée (autant que possible une bonne), un peu de moyens (allant de quelques dollars en poche à quelques milliers), un minimum d’équipements (pour moi, un portable, une connexion Internet, papier et crayon suffisaient) et surtout du temps (idéalement plus de 24 h dans une journée!).
 
Là où ça pose un problème, ce n’est pas les moyens ni le soutien (qui souvent se rapproche plus du commentaire « est-ce que ça va être payant ton affaire? ») pas plus que l’idée qui dans certains cas est totalement farfelue (mais bon, souvent plus c’est fou, plus ça marche!). Non, le problème se situe au niveau du temps… Cette ressource composée de secondes, de minutes, d’heures, de semaines, de mois et d’années… et qui est trop souvent négligée dans l’équation. On s’imagine qu’on peut tout faire, le temps de crier ciseaux. (Ciseaux?!?!? Tant qu’à crier, criez : « Scandale au parlement! » D’accord, c’est plus long, mais au moins on va vous écouter!) Eh bien non…
 
Et puis, comme on a du temps en quantité — plus que les salariés qui eux courent toujours après le temps (bien oui, lorsqu’on travaille à notre compte, la banque nous prête et de l’argent et du temps. Je ne vous l’avais pas dit? Pardonnez-moi cet oubli sélectif, voulez-vous? En devenant entrepreneur, voilà qu’on nous dit qu’on a « enfin » le temps de faire notre travail et de réaliser nos rêves. Mouais… C’est ce qu’on nous dit.) —, on accepte tout, même le travail qui n’est pas dans nos cordes (d’ailleurs comment le savoir, si on n’a jamais essayé!).
 
Voilà. On lance nos intentions à tous vents, espérant que notre projet s’envole comme un magnifique cerf-volant. On est prêt à secouer notre destin pour lui dire dans le blanc des yeux : « Hé! je suis là! Alors ne m’oublie pas… »
 
Il fait beau, le soleil est au rendez-vous, on en profite pour aller prendre un café sur une terrasse ombragée. La vie d’entrepreneur, c’est plutôt cool en cette fin d’après-midi. Notre horaire flexible nous a permis de prendre congé le reste de la journée et de savourer cette belle lumière qui crée des ombres sur la mousse veloutée du cappuccino. Et voilà que le téléphone sonne.
 
Sans arrêt.
 
La boîte de messagerie déborde de courriels attendant une réponse de notre part.
 
L’univers nous a entendu…
 
Et il nous répond « massivement ».
 
Et une fois qu’on a dit à tout le monde qu’on est bon dans ce que l’on fait, que l’on est disponible, qu’on peut le faire, comment faire marche arrière sans avoir l’air complètement idiot? Songez-y? On ne peut tout simplement pas… On s’est pris les pieds dans l’engrenage, celui-là même qu’on a conçu, huilé et déclenché.
 
L’aspect flexible prend alors un autre sens. Notre journée de labeur qui se situait autour de sept heures bascule et connaît des pics de travail de douze, voire quinze heures. On se lève à l’aurore réveillant les oiseaux de par notre activité effrénée… Ben oui, notre délai (que dis-je nos délais!) nous attend comme la lame tranchante de la guillotine. Loin de nous stimuler, on redoute cette date. Elle nous rend malade. Parce qu’entre vous et moi, du temps, on n’en a pas!
 
C’est pourquoi j’affirme qu’un travailleur automne est un travailleur de vie. Il chamboule son existence pour sa vocation, son métier, sa passion, son projet. Il va repenser cent fois à son horaire pour maximiser cette ressource épuisable et non remplaçable qu’est le temps. Il va développer un talent que peu de gens possèdent : il va apprendre à prioriser et à choisir ce qui compte vraiment pour lui.
 
Forcément, il l’aura appris à la dure. Le manque de sommeil, une mauvaise alimentation (quand il pense à se nourrir), la perte d’amitiés seront le prix de cette longue bataille pour se créer une vie; une vie d’entrepreneur.
 
Certes, il va continuer à aider les autres, à accepter des contrats peu rentables, mais le plus important, il va apprendre à « se » choisir »… Qu’est-ce que je veux? Qu’est-ce qui me fait du bien? Qu’est-ce qui est important pour moi?
 
Voilà des questions auxquelles chacun de nous doit répondre (salarié ou non).
 
Ces derniers mois, j’ai appris (encore!) que parfois, il faut enlever tout le bagage qui pèse sur nos épaules et faire des choix. On regarde tout ce qu’on a déposé par terre et on évalue. Et bien souvent, ce ne sont que quelques éléments qui reprennent fidèlement leur place. Éléments plus légers et beaucoup mieux adaptés à la forme de nos épaules.
 
Être travailleur autonome? C’est travailler sa vie…
 
Donnons-lui la forme, la couleur et l’élan qui lui revient!
 
Jocelyne Gagné (Mésange)