L’eau monte; le moral descend!

Quand on pense au printemps, on songe aux jolies robes, aux températures plus douces, aux couleurs qui surgissent du sol. Notre mémoire nous rappelle les belles soirées à flâner le long du fleuve avec, en bruit de fond, la pétarade des motos. Le soleil pousse les gens à nettoyer leur terrasse, leur cour, leur barbecue. Et l’intérieur des maisons? Ça va de soi; on fait le grand ménage! Évidemment, on finit par regarder tous ces articles qu’on entrepose année après année avec une pointe d’agacement dans le cœur. On s’en veut de les avoir laissé entrer. On se culpabilise de leur indiquer la sortie. 

Ben oui, c’est encore bon! Pourquoi s’en départir? 

Le printemps est là. 

Et les couleurs? Elles hésitent. 

Le gris sale monopolise le décor. Et le moral. 

Le ciel continue de déverser son eau… Encore et encore. Si bien que les sous-sols se remplissent au même rythme que les poches se vident. Ce printemps va coûter cher. Pour beaucoup de monde. Même les gens situés loin des rives écopent. Pas facile! 

Et une fois que l’eau s’est fait un chemin dans votre chez-vous (ce chez-vous si accueillant, si chaleureux, si confortable), elle tend à y retourner à chaque grosse averse. 

Soupir...

Puis tous ces objets que l’on hésitait à jeter flottent tout comme ces malheureux navires qui prennent l’eau. Et vous, vous regardez ces « éponges » se gorger de votre découragement.

Soupir...

Il va falloir pomper toute cette eau, éponger le sol et jeter ce qu’on croyait pouvoir garder pour un au-cas-où. 

Le printemps prend une drôle d’allure quand vous mettez au chemin vos avoirs (ceux que vous ne vouliez plus et ceux que vous vouliez conserver). Il n’y a rien de joyeux à nettoyer en vitesse pour éviter les champignons ou toute autre pourriture. On se demande alors à quoi sert un sous-sol si ce n’est qu’à servir d’entrepôt à notre manque de courage à prendre une décision. 

Il n’y a pas que les sous-sols qui souffrent de nos débordements émotifs. Chaque pièce contient un nombre incroyable d’objets qui ne servent plus. 

Et un objet qui ne sert plus n’a plus sa raison d’être; il doit servir ou bien partir. C’est assez simple! 

Que ce soit dû aux pluies, aux rivières qui débordent ou à la tuyauterie qui lâche, il y a une petite prise de conscience à faire lorsque l’eau vient nous gâcher l’existence : 

 Il est peut-être temps de se détacher de ses biens!

Quand on y pense, ce ne sont qu’un bureau, un canapé et des livres… On les a un jour aimés, appréciés et utilisés… Il faut les laisser partir, non pas par dépit, mais avec gratitude. Ils nous ont rendu service et maintenant, pourquoi ne pas en profiter pour épurer notre environnement et faire de la place à la vie? Pourquoi ne pas saisir cette occasion pour faire le point sur notre façon de consommer? 

Au lieu de passer notre temps à chercher de l’espace pour tous ces objets, à nous inventer des systèmes pour ranger et classer nos avoirs, pourquoi ne pas utiliser ce temps pour vivre et vivre vraiment? 

Et si toute cette eau nous apprenait une des plus grandes leçons de vie? Que l’existence, la nôtre, prend toute son expansion non pas entre les quatre murs de notre maison, mais bien dehors avec la nature et les gens. Que ce qui nous anime et nous comble, ce ne sont pas nos possessions, mais l’expérience même de la vie. 

Si le printemps hésite à montrer ses couleurs, ce n’est que pour une raison : lui aussi fait son ménage! 

En ce lundi matin, regardez de plus près la relation que vous entretenez avec les objets et les gens. Le détachement a du bon; il nous donne une plus grande flexibilité et une plus grande liberté nous octroyant ainsi un plus grand pouvoir sur les circonstances. 

Finalement, si vous êtes tentés d’acheter, de pousser le vieux avec du neuf, OK, pas de problème, mais avant, assurez-vous que ce qui va entrer dans votre maison ne devienne pas une lourde chaîne qui vous retiendra à l’arbre de vos possessions. 

C’est long longtemps une vie privée de toute liberté! C’est souffrant une vie quand on porte sur le dos tous ces biens qu’on a accumulés au fil des ans! Entre vous et moi, c’est de la misère optionnelle. 

Bon lundi et bonne semaine tout le monde! 

Jocelyne Gagné (Mésange)  


[La rivière des Mille-Îles, Terrebonne, 23 avril 2017]

Bonne tête et gros bras

Du plus loin que je me rappelle, j’ai toujours trouvé que les étapes d’un projet me faisaient l’effet de dos-d’âne disposés en travers de la chaussée m’obligeant à ralentir, moi qui m’obstinais à vouloir arriver au plus vite au résultat.

Cela m’a pris des années avant de réaliser que si je ne voulais pas me casser la gueule dans ma hâte d’en finir au plus vite, j’allais devoir procéder autrement. 

En disposant d’un plan. 

D’un plan marqué d’étapes et d’un échéancier. 

Je vous entends déjà ronfler… Je vous comprends. 

J’ai jadis ronflé, et ce, pour les mêmes raisons. 

Et plus d’une fois, j’ai dû soigner mon nez (et certaines parties de mon anatomie sensibles aux coups durs de la vie) à cause d’une insuffisance de réflexion et de préparation; l’expérience m’a démontré à la dure que si on ne procède pas par étapes, on n’y arrive tout simplement pas. 

Je le reconnais : je suis portée à mettre la charrue devant les bœufs… Par conséquent, il m’arrive de m’énerver devant cette même charrue et de me plaindre qu’elle n’avance pas, grognant contre ces bêtes qui me bousculent par-derrière et dont l’odeur ferait fuir les mouches et toute bonne volonté. Bref, cela demande tout un contrôle pour revenir à mes fameuses étapes… Et du courage. 

Pourquoi est-ce que je vous raconte ça? Eh bien, parce que c’est facile de s’éparpiller et de dilapider son énergie aux quatre vents. Il est commode de sauter des étapes (surtout celles qui nous rebutent) en se disant que personne ne va le remarquer, qu’on va y arriver avec peu d’efforts. 

C’est toujours ce que l’on croit. 

Oui, c’est facile de s’épuiser à être partout à la fois tout ayant l’impression que rien n’avance. C’est tuant psychologiquement de se rendre compte qu’il y a toujours quelque chose qu’on a oublié de faire à la fin de la journée. Et plus encore, que ce sur quoi on a consacré tous nos efforts et que l’on a fait à la perfection ne comptait que pour des « peanuts ». 

Je le sais, car je l’ai vécu. Plus d’une fois. Et je peux vous certifier qu’un plan simple vaut mieux que pas de plan du tout. Qu’un plan simple vaut mieux qu’un plan parfait qu’on laisse dormir dans le tiroir. Et j’ai réalisé aussi ceci : certaines tâches doivent être faites que ça nous plaise ou non et que la perfection, à certains moments, n’a pas sa place. 

Alors, j’ai fait un plan pour tout ce qui semblait énorme dans ma vie. Le fait de procéder par étapes, un coup de pelle à la fois, m’a assuré de deux choses : 1) le tas de terre qui me dérangeait va finir par disparaître et 2) si j’ai été capable de charrier quarante-huit brouettées de terre, je pouvais réaliser n’importe quoi. 

Vous savez quoi? Mon tas de terre a disparu. Le tri des papiers a été fait. La vente des outils tire à sa fin. Le garage s’est vidé de tout ce qui l’encombrait et la maison respire la fraicheur et le renouveau pour les prochains occupants. Je suis fin prête à entamer la prochaine étape : laisser tout doucement certains souvenirs se dissoudre dans le temps et fixer mon attention sur le présent - celui-là même qui forgera mon futur. 

Un plan, c’est bien. Et le suivre méthodiquement en restant ouvert aux surprises de la vie, c’est encore mieux. 

En ce lundi matin, je vous invite à procéder par étapes dans tout ce qui vous semble gros, insurmontable. En somme, allez-y un coup de pelle à la fois. 

Bonne semaine! 

Jocelyne Gagné