Donner l'impression c'est aussi la perdre

Impressionner, ça ne dure que cinq secondes ou dans le meilleur des cas, jusqu’au moment où celui que l’on souhaite impressionner décide à son tour de nous impressionner. Et de fil en aiguille, ce qui semblait une conversation légèrement teintée de vantardise devient vite une compétition où chaque participant souhaite à tout prix gagner le dernier mot, c’est-à-dire l’éblouissement total de son opposant : « Enfin, je le vois dans ses yeux : il m’envie! » Mmm…

 

Cinq secondes et c’est tout!  Profitez de ce moment, car il sera aussi bref qu’un vent échappé par mégarde en pleine homélie! Après quoi, vous constaterez tristement que vous venez de perdre cette impression de grandeur si durement gagnée!

 

Vous rappelez-vous vos querelles enfantines dans la cour d’école? Moi, je m’en souviens. Souvent après une escalade de propos accusatoires et irrévérencieux, les provocations se terminaient par une phrase reconnaissable entre toutes : « Mon père est plus fort que le tien! » Comme si pour clore la discussion, on venait de sortir la grosse bête qui allait faire reculer notre adversaire, le poids lourd qui allait faire pencher la balance en notre faveur, c’est-à-dire notre père! Et que par sa taille formidable ou par la grosseur de son poing, cela suffirait à clouer le bec à notre adversaire…

 

Qu’est-ce qui a changé depuis ces confrontations à côté du « rack » à bicycles? Rien du tout. À l’époque, on cherchait à impressionner; parfois, cela marchait et d’autres fois, pas du tout. Parce que, voyez-vous,  le papa en question, jamais il ne se pointait durant nos guéguerres d’enfants; pas fou, le bonhomme! D’ailleurs, comme tout général d’armée, il préférait rester à l’abri des obus et des tirs à vue!

 

Alors, pourquoi continuer à se comporter de la sorte? On dépense parfois des fortunes pour un moment de gloire qui dure si peu. Si vous décidez de vous offrir une maison ou une voiture luxueuse, de faire un voyage exotique ou de relever un défi spectaculaire, faites-le parce que vous en avez envie et non pour épater la galerie. En souhaitant impressionner, tout ce que vous aurez gagné c’est de la suffisance, mais vous perdrez au change votre bonne impression; celle-là même qui faisait en sorte qu’on vous appréciait.

 

En ce lundi matin, je vous invite à rester simple dans votre façon d’être et de faire. Nul besoin de susciter chez les autres une vive impression par vos prouesses. Vous êtes bons et vous le savez… Ça devrait suffire, vous ne trouvez pas? Pour ma part, je m’en vais me préparer un bon café dans la simplicité de ma cuisine. Je vais y ajouter du lait — provenant probablement d’une vache des plus banales — et savourer ce divin breuvage dans un fauteuil berçant très quelconque. Et vous savez quoi? Quel merveilleux lundi ce sera!

 

Impressionnés? M’semblait bien aussi ;-)

 

Bonne semaine tout le monde!

 

Jocelyne Gagné (Mésange)